Depuis mon plus jeune âge , je m’adonne au dessin et à la peinture avec prédilection au point que j’ai hésité au moment de mon inscription en faculté à me diriger vers des études artistiques .
Pour des raisons économiques mais peut être aussi par peur des lendemains difficiles, j’ai opté pour des études classiques de médecine.
Cours de peinture Martenot
Cours auprès de Véronique De Vaucorbeille :
Peindre Chardin ; Peinture du 18 ème siècle : Vies silencieuses .
Cours auprès de Pascale Rigat- Esselin :
Dessin, peinture (aquarelle, gouache, peinture à l’huile.
Cours de modèles vivants.
Cours auprès de Joëlle Rousselet :
peinture acrylique et parcours vers l’abstraction.
Cours auprès de Patrick Blanchon :
peinture à l’huile.
Cours auprès de Françoise Monnier
Atelier de soutien au processus créatif ; acrylique, craies, encres, pigments, pastels…
Cours de modelage terre et cuisson Raku auprès de Sylvie Duvaud
2019 : Stage de Raku auprès de Arlette et Marc Simon : Le Chambon sur Lignon.
Pratique de techniques diverses peinture, terre, résine en atelier personnel.
Depuis mon plus jeune âge, je m’adonne au dessin et à la peinture avec prédilection au point que j’ai hésité au moment de mon inscription en faculté à me diriger vers des études artistiques. Pour des raisons économiques mais peut être aussi par peur des lendemains difficiles j’ai opté pour des études classiques de médecine.
Je suis donc médecin depuis 1984, diplômée en psychiatrie depuis 1993.
J’ai tenu des postes hospitaliers (encore aujourd’hui en 2019) mais j’ai aussi eu une pratique libérale au centre de Lyon pendant plus de vingt ans qui m’a énormément pris de temps et d’énergie au quotidien, me tenant éloignée de mon activité créatrice. Malgré tout je me suis évertuée à préserver de petits territoires temporels à cette passion. Depuis 5 ans je pratique des ateliers d’écriture qui sont aussi un autre moyen d’avancer dans ma recherche, faisant un pont entre mes intuitions et mes projets de recherche artistique. L’écriture c’est la traque du mot juste, la chasse au mot de trop, à l’anecdote inutile. C’est un exercice essentiel pour le peintre ; Simplifier ce n’est pas enlever, c’est trouver le moyen de conjuguer les présences. Le texte retrouvé en soi donne du sens à l’immanquable hasard de la création en le canalisant sous une probable explication d’un déjà présent mais insu de soi. En cela mon parcours de psychiatre et de psychanalyste m’a permis d’être plus juste vis à vis de mouvements personnels, de les accepter dans mon travail comme des témoins reconnaissables par leur immaturité perfectible. J’ai donc accepté que mon cheminement soit potentiellement porteur de plus de surprises et de maladresses, dues à l’absence d’une formation académique rigoureuse et ai tentée de me tenir éloignée des répétitions névrotiques, mi-copiées mi-timides dépourvues de démarche artistique ;
Je voudrais dire que j’ai été portée par une intention artistique quotidienne. Les voyages et les grands espaces sont aussi mon équilibre; Je vis dans une campagne assez éloignée de la ville pour avoir une belle nature environnante ainsi que le calme qui l’accompagne. J’ai une toute petite maison sur une île, sans voiture ou presque, ou les oiseaux élisent domicile l’hiver pour se reproduire. Il me serait impossible de transposer sur la toile avec les artifices colorés du peintre, un quelconque souvenir qui n’aurait pas été travaillé en moi dans l’évidence du recul. Et qu’il s’agisse d’un souvenir triste n’en change pas le procédé de travail préliminaire. Le cadre de l’entretien psychanalytique revient là encore avec cette belle exigence de liberté d’élaboration dans le calme.
Je lis, et j’écris. Des formes de silence pas contemplatives mais réflexives en lien avec mon expérience. Car je n’ai pas été épargnée par les discours de mes patients : Si leurs vies les ont malmenés, les douloureuses expressions de leurs souffrances m’ont sidérées plus d’une fois. Partant de cette constatation et mue par un puissant désir de ne pas sombrer avec eux je me suis intéressée à ce qui était à ces moments en travail chez moi. Qu’est ce qui s’organisait comme solution mémorielle à la fin de ces journées, ces semaines, ces années de travail : Que me restait il de ces souffrances côtoyées et absorbées un peu par mon écoute et ma présence. D’une même façon je me suis penchée sur ce que mes expériences existentielles, voyageuses, culturelles avaient dessinées, travesties, colorées, fabriquant ce que l’on nomme souvenir personnel, et je me suis mise à déposer ces couleurs ces graphismes qui pouvaient devenir une tentative de traduction partagée de l’émotion comme les mots le sont plus classiquement dans nos échanges.
Que reste t -il dans nos mémoires d’une période de vie (l’adolescence, le jardin de notre grand père), de moments qui reviennent scander nos vies (les aubes des premiers jours de vacances. La fraicheur du sable à l’ombre du parasol, les allées des cimetières où nous laissons tant d’êtres chers..) ? Quand brusquement dans nos journées on est rappelé par une mystérieuse association d’idée à un quelconque confetti de souvenir, n’est ce pas en couleurs que nous sommes habités et que plutôt qu’une image précise qui n’a pas loisir de s’installer dans nos cerveaux trop performants, c’est l’abstraction colorée qui prend le dessus. Pour exemple, le jardin du grand père me vient ici en tête:
Je dirais qu’entre l’hypothétique souvenir visuel de rangées de petits pois, d’arrosoir écaillé renversé, de parasol à l’effigie d’une marque de boisson anisée, le tout vaporisé d’une phrase mythique de notre aïeul jamais prononcée en ce lieu mais faussement déplacée par nous, pouvant nous faire monter les larmes aux yeux, c’est un bain de couleurs résiduelles qui nous habite de ce feu d’artifices coloré, toutes saisons se succédant dans ce jardin d’enfance, allant jusqu’à rajouter amèrement les derniers temps du jardin, une fois que plus personne ne venait s’en occuper et que les mauvaises herbes désolaient tout sur leur passage. . Cette résultante d’heures heureuses et de cours forcé de la vie… Mais comme il est de règle dans nos cabinets de psychanalyse… c’est ce que je veux rendre en une toile. Sans pour autant tout dire qui serait l’inverse de ressentir. La simplification citée plus haut prend alors toute sa force.
Conjuguer les présences c’est apaiser notre système mnésique si fragile.
Quelques nouvelles de mon cheminement et de mon travail actuel:
J’expose du 15 au 20 février 2022 au Grand Palais éphémère à Paris au salon de la peinture à l’eau .
Je prépare une exposition sur l’île d’Arz du 12 au 24 juillet 2022.
Ma peinture est devenue au fil du temps beaucoup plus intérieure . Je me suis défaite du figuratif et de l’observation du modèle extérieur ou trop de choses viennent distraire .Beaucoup trop de choses encombrent et détournent de ce que l’on veut atteindre comme vérité. Une peinture exécutée seule à seule à l’atelier aura toujours plus de concision que l’autre faite en extérieur avec tout ce qui passe par la tête .
Nicolas de Staël parlait d’un couple de fulgurances : Celle de l’autorité et celle de l’hésitation .
Je rajouterais que la balance existe aussi entre ce qui encombre et que l’on enlève et ce que l’on rajoute pour parvenir à la vérité . Cela s’adapte au trait ,au rythme complexe d’une forme , au repos de l’oeil devant un fond unifié , à l’équilibre parvenu.
D’un travail qui assemblait en un raccourci coloré ,des impressions, des souvenirs d’un endroit ,d’un voyage d’une période de vie sur quelques centimes carrés de toiles j’en ai fait une exposition l’an dernier dans le Rhône où je vis et j’ai travaillé . Accrochage de 35 toiles .
Actuellement je me concentre dans une abstraction encore plus personnelle qui pourrait correspondre à la phrase de Roland Barthes : « En me remémorant je me pense ».
Le printemps 2020 restera dans nos mémoires celui d’une nouvelle expérience : le vivre confiné. Pour certains l’expérience a été terrible pour beaucoup nous nous sommes répartis le long d’un continuum de résiliences plus ou moins aisées jusqu’à ceux qui seront déçus le jour où la vie reprendra ses droits.
J’ai choisi de traverser ces semaines avec le chef d’œuvre de Marcel Proust que, je l’avoue, je n’avais jamais ouvert gardant ce monument pour ma retraite. il m’a semblé que traverser ces semaines de disette relationnelle ( même si j’ai continué à exercer ma profession de médecin psychiatre à l’hôpital ,que je n’étais pas confinée seule, et que les moyens modernes me permettaient d’échanger avec de nombreux humains ) avec une multitude de personnages passés sous le microscope quasi psychanalytique de Proust pouvait réparer cette solitude imposée . Personne ne pourrait me verbaliser s’il me prenait l’envie de parcourir sans fin tous les chemins autour de Combray en compagnie de l’auteur. Ni m’interdire de participer aux soupers mondains des Verdurins entourée d’une joyeuse compagnie ou d’arpenter les plages de Balbec avec des amis …
N’étais-je pas arrivée moi-même au bord d’un temps qui, par cette sentence subite que l’on nous imposait, disparaissait et serait bientôt perdu.
Rejouerons-nous encore dans les mois à venir le monde d’hier ou n’y aura-t-il plus que l’art pour le représenter à nos souvenirs ?
Puisqu’il est dans ce livre question de mémoire et que ma recherche artistique entremêle formes et couleurs dans un rapport orchestré par des climats esthétiques personnels lieux d’orages sensoriels j’ai voulu m’arrêter sur deux passages où Proust aborde l’écriture comme un peintre.
« …, et m’aidaient à mieux comprendre la contradiction que c’est de chercher dans la réalité des tableaux de la mémoire, auxquels manqueraient toujours le charme qui leur vient de la mémoire même et de n’être pas perçus par les sens. »
« La réalité que j’avais connue n’existait plus. Il suffisait que Mme Swann n’arrivât pas toute pareille au même moment, pour que l’avenue fût autre. Les lieux que nous avons connus n’appartiennent pas qu’au monde de l’espace où nous les situons pour plus de familiarité. Ils n’étaient qu’une fine tranche au milieu d’impressions contiguës qui formaient notre vie d’alors ; Le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant ; et les maisons, les routes, les avenues sont fugitives, hélas comme les années. »
Le temps du deuxième confinement m’a cueilli à l’orée de mon nouveau métier, ce mot s’entend mystère et ministère, à la fois rêveries indomptées et idée d’être l’instrument, l’exécutante de forces imaginatives.
Au grès de mes lectures et de mes écoutes, j’ai rencontré deux textes, le premier d’un écrivain se promettant de finir sa vie devant une toile, l’autre d’un philosophe dont l’introduction m’a été donnée par une émission sur France culture le 11 novembre et qui m’a poussé à ouvrir un de ses livres « l’art de rêver « paru après sa mort : Un recueil de textes sur l’art et sa relation à la rêverie.
D’abord, l’écrivain Laurent Mauvignier, interviewer dans le Télérama du 26 aout 2020 ( n°3685 ) à l’occasion de la sortie de son livre : Histoires de la nuit . Roman que j’ai d’ailleurs dévoré en quelques heures tant le suspense à pas comptés qui exsudaient des pages était addictif. Cet auteur de multiples romans, qui aborde la cinquantaine, raconte qu’au bout de son parcours d’écrivain il entreprendra une carrière de peintre. Au détour de ses phrases il cite la folie … Toutes résonances qui me confortent dans ces multi directions que j’emprunte puisque d’autres s’y risquent avec le même enthousiasme.
« La peinture me fascine par sa proximité avec la folie. Une couleur n’est pas là pour dire quelque chose, elle est là parce qu’elle est là. J’aime la superposition des couches, la succession des trames, ce qu’on appelle si joliment les « repentirs ». J’essaie de restituer cette matérialité en littérature, de garder un geste d’écriture qui ne soit pas lisse, qui porte la trace de mes hésitations et de mes choix. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot. Je garde l’impression que quelque chose ne s’est pas accomplie et qu’il me faudra revenir à la peinture. Je m’imagine très bien, vieux, tout arrêter pour ne faire que peindre.
D’un autre coté la découverte d’un philosophe qui s’est penché sur la créativité : Gaston Bachelard ;
« Ainsi les éléments, le feu, l’eau, la terre qui ont si longtemps servi aux philosophes pour penser magnifiquement l’univers, restent les principes de la création artistique. Leur action sur l’imaginaire peut sembler lointaine, elle peut sembler métaphorique. En fait en acceptant la sollicitation de l’imagination des éléments, le peintre reçoit le génie naturel d’une création.
Il postule que la peinture serait une refiguration du monde que nous installerions préalablement au langage. Que l’imagination mettrait le sujet en relation avec des germinations affectives puissantes (ces états archaïques que la psyché traverse dans les premiers mois de la vie (en termes psychanalytiques).
Créativité et imagination : Un art d’être soi, de peupler sa solitude. Un rapport profond existerait pour lui entre rêverie et existence.
Dans ce recueil « l’Art de rêver « il consacre un chapitre au peintre Marc Chagall. A propos de qui, il dit « Inventer une couleur nouvelle est pour le peintre une jouissance paradisiaque. Dans une telle jouissance le peintre regarde ce qu’il ne voit pas : Il crée. A chaque peintre son paradis. Chagall, lors de leurs longues conversations lui a soutenu que : « Non, il faut beaucoup rêver. Rêver en prenant conscience que la vie est un rêve, que ce qu’on rêve au-delà de ce qu’on a vécu est vrai, est vivant, est là, présent en toute vérité devant nos yeux.
Sans cesse, durant son travail, le peintre mène des songes situés entre la matière et la lumière. Il médite sur l’énergie de la matière qui nourrit la forme et projette la couleur.
De celui qui a peint un jour sa cathédrale en bleue prise dans les brumes du matin, un autre jour en ocre dans les rayons du soleil, Bachelard dira : « Avec de la pierre, Monnet a fait de la brume et de la chaleur. De la toile aérienne (la brume) à la toile solaire le peintre a enraciné la couleur dans la matière « il rajoutera : « Pour un vrai peintre, les objets créent leur atmosphère, toute couleur est une irradiation, toute couleur dévoile une intimité de la matière ;
Bachelard détend là, le débat entre le non figuratif et le figuratif, la rêverie s’est insinuée là où il n’y avait antérieurement que l’œil. Il n’a rien trahi de la vérité, il s’est laissé influencé par le » caractère actif de l’objet primordial ».
Pour appuyer sa démonstration, Bachelard se fait aider d’un poète, un maitre en rêverie, Charles Baudelaire qui devant une toile médiocre représentant des animaux s’ébattant dans une mare, s’exclame : « Il faut beaucoup rêver pour comprendre une eau tranquille et ne pas faire nager les canards dans la pierre. »